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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Ausnit, Olariu și Asociații v Commission (Connecting Europe Facility (CEF) - Grant agreemen - Judgment) French Text [2025] EUECJ T-397/23 (09 April 2025) URL: https://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2025/T39723.html Cite as: EU:T:2025:380, [2025] EUECJ T-397/23, ECLI:EU:T:2025:380 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)
9 avril 2025 (*)
« Mécanisme pour l'interconnexion en Europe (MIE) - Convention de subvention - Projet “Setup and ITS connectivity of safe and secure truck parking areas in Romania along TEN-T core network corridors” - Décision formant titre exécutoire - Article 299 TFUE - Coûts éligibles - Non-respect du principe de bonne gestion financière dans l'attribution de marchés à des tiers - Proportionnalité - Confiance légitime »
Dans l'affaire T‑397/23,
Ausnit, Olariu și Asociații SRL, établie à Lugoj (Roumanie), représentée par Me F. Irimia, avocat,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par M. R. Onozó, Mme T. Isacu de Groot, M. S. Romoli et Mme E. Stamate, en qualité d'agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL (sixième chambre),
composé de Mmes M. J. Costeira, présidente, M. Kancheva et E. Tichy‑Fisslberger (rapporteure), juges,
greffier : M. V. Di Bucci,
vu la phase écrite de la procédure,
vu l'absence de demande de fixation d'une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l'article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
1 Par son recours fondé sur l'article 263 TFUE, la requérante, Ausnit, Olariu și Asociații SRL, demande l'annulation de la décision C(2023) 3232 final de la Commission, du 10 mai 2023, concernant le recouvrement d'un montant de 4 013 520,16 euros (ci-après la « décision attaquée »).
Antécédents du litige
2 Le 19 octobre 2016, l'Agence exécutive pour l'innovation et les réseaux (INEA), devenue l'Agence exécutive européenne pour le climat, les infrastructures et l'environnement (ci-après l'« agence »), agissant en vertu des compétences déléguées par la Commission européenne, et la requérante ont signé la convention de subvention no INEA/CEF/TRAN/M2015/1144643 au titre du mécanisme pour l'interconnexion en Europe (ci-après la « convention de subvention ») en vue de la mise en œuvre du projet intitulé « Setup and ITS connectivity of safe and secure truck parking areas in Romania along TEN-T core network corridors » (Installation et connectivité STI d'aires de stationnement sûres et sécurisées pour les camions en Roumanie au long des corridors du réseau central RTE-T, ci-après le « projet »). La requérante était l'unique bénéficiaire de cette convention.
3 La convention de subvention indiquait que la période de mise en œuvre du projet allait du 17 février 2016 au 28 février 2018 (article 2.2 de la convention de subvention). La contribution financière maximale de l'Union européenne au projet a été fixée à 4 250 000 euros, ce qui représente 85 % des coûts totaux éligibles de l'action, estimés à 5 000 000 euros (article 3 de la convention de subvention).
4 Le 3 novembre 2016, un préfinancement a été versé à la requérante pour un montant total de 1 700 000 euros.
5 Le 24 avril 2018, la requérante a présenté le rapport final et a déclaré un montant total de 5 017 170,46 euros au titre des coûts du projet pour toute la durée de celui-ci.
6 Le 16 juillet 2018, l'agence a informé la requérante que le montant total des coûts éligibles du projet s'élevait à 4 877 832,97 euros, ce qui a donné lieu à une contribution de l'Union de 4 146 158,02 euros. Ce montant a été compensé par le préfinancement (voir point 4 ci-dessus). Le solde restant de 2 446 158,02 euros a été versé à la requérante le 18 juillet 2018.
7 Par la suite, l'agence a commandé un audit externe couvrant toute la période de mise en œuvre du projet. L'audit a eu lieu du 25 au 27 juin 2019 et le rapport d'audit a été présenté le 24 avril 2020. Dans ce rapport d'audit, il a été estimé, d'une part, que la requérante n'avait pas démontré qu'elle avait respecté le principe de bonne gestion financière lors de l'attribution de marchés à des tiers pour la mise en œuvre de certains aspects du projet et, d'autre part, qu'il n'y avait pas de preuves concernant le rapport qualité/prix de ces marchés. L'auditeur a notamment relevé que la passation des marchés qui ont été audités n'était pas conforme au principe de bonne gestion financière. En particulier, il a relevé que trois contrats avaient été attribués à des fournisseurs présélectionnés, que la passation des marchés n'assurait pas que des soumissionnaires provenant d'une zone géographique plus étendue avaient pu participer, étant donné que la requérante n'avait adressé des invitations à soumettre des offres qu'à des fournisseurs locaux préidentifiés, au lieu de publier ces invitations. S'agissant de certains des marchés audités, il a été également relevé qu'il n'était pas assuré qu'un minimum de trois soumissionnaires était éligible, que des conditions techniques et financières minimales avaient été appliquées, que des fournisseurs présélectionnés avaient été choisis selon une procédure garantissant le meilleur rapport qualité/prix, ni que les fournisseurs potentiels qui avaient participé à l'élaboration du budget du projet avaient été exclus d'office de la procédure de passation des marchés. L'auditeur a également formulé certaines remarques concernant l'enregistrement des heures de travail consacrées à la mise en œuvre du projet. Par suite, il a conclu qu'un montant de 4 721 788,43 euros constituait des coûts non éligibles du projet et que la subvention devait donc être rejetée à hauteur de 4 013 520,16 euros.
8 Le 19 mai 2020, l'agence a adressé une lettre de préinformation à la requérante, dans laquelle elle l'a informée de son intention de recouvrer le montant de 4 013 520,16 euros. L'agence a rappelé les conclusions de l'audit externe figurant au point 7 ci-dessus et a invité la requérante à présenter ses observations éventuelles.
9 Le 23 juin 2020, la requérante a soumis ses observations à l'agence en contestant les conclusions de l'audit.
10 Par la note de débit no 3242011065, transmise le 7 octobre 2020 (ci-après la « note de débit »), l'agence a invité la requérante à payer le montant de 4 013 520,16 euros au plus tard le 4 janvier 2021.
11 Par une lettre du 23 décembre 2020, la requérante a rejeté la demande de paiement en faisant valoir que l'intention de recouvrer le montant en cause était contraire aux dispositions de la convention de subvention. En particulier, la requérante a soutenu que ses règles internes pour l'attribution des marchés liés au projet et l'article II.9.1 de la convention de subvention étaient les seules règles applicables en l'espèce et qu'elle avait respecté tant ces règles internes que cette disposition, dès lors qu'elle avait attribué les marchés en cause aux soumissionnaires offrant les prix les plus bas. Elle en a conclu que le recouvrement était contraire aux principes de proportionnalité, de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime.
12 Le 20 janvier 2021, la Commission a transmis une lettre de rappel à la requérante.
13 Le 22 janvier 2021, l'agence a accusé réception de la lettre de la requérante du 23 décembre 2020 et a informé celle-ci qu'elle lui répondrait après une évaluation plus approfondie de la situation. L'agence a également attiré l'attention de la requérante sur le fait que la procédure de recouvrement de la note de débit ne serait pas suspendue.
14 Les 12 et 17 février 2021, la Commission a adressé à la requérante, respectivement par courrier électronique et par lettre recommandée avec accusé de réception, une mise en demeure de payer le montant en cause.
15 Le 5 mars 2021, l'agence a répondu à la lettre de la requérante du 23 décembre 2020. Elle a reconnu les efforts de la requérante pour mettre en place des règles internes pour l'attribution des marchés aux soumissionnaires offrant les prix les plus bas, conformément à l'article II.9.1 de la convention de subvention, mais a constaté que les procédures d'attribution des marchés menées par la requérante n'avaient pas garanti la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires, en violation du principe de bonne gestion financière prévu à l'article II.19.1, sous f), de cette convention. En particulier, l'agence a exprimé ses doutes sérieux sur l'adéquation desdites règles internes avec la complexité et la valeur des contrats conclus avec des tiers dans le cadre de la mise en œuvre du projet. L'agence a également estimé que les principes de proportionnalité et de sécurité juridique ne s'opposaient pas, en l'espèce, au recouvrement du montant en cause. La requérante a été invitée à présenter des observations complémentaires.
16 Le 1er avril 2021, la requérante a présenté ses observations complémentaires en réitérant son point de vue selon lequel la note de débit violait les dispositions de la convention de subvention.
17 Le 26 avril 2021, la requérante a fourni des liens Internet renvoyant vers des enregistrements vidéos démontrant que les travaux avaient été exécutés et que le projet avait eu un résultat positif.
18 Le 3 juin 2022, la Commission a adressé un dernier rappel à la requérante, par lettre recommandée avec accusé de réception. La requérante n'a pas répondu à cette dernière lettre.
19 Le 10 mai 2023, la Commission a adopté la décision attaquée dont les visas indiquent comme base légale l'article 299 TFUE et l'article 100, paragraphe 2, du règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil, du 18 juillet 2018, relatif aux règles financières applicables au budget général de l'Union, modifiant les règlements (UE) no 1296/2013, (UE) no 1301/2013, (UE) no 1303/2013, (UE) no 1304/2013, (UE) no 1309/2013, (UE) no 1316/2013, (UE) no 223/2014, (UE) no 283/2014 et la décision no 541/2014/UE, et abrogeant le règlement (UE, Euratom) no 966/2012 (JO 2018, L 193, p. 1).
20 Au considérant 17 de la décision attaquée, la Commission rappelle que les procédures d'attribution des marchés menées par la requérante dans le cadre du projet n'avaient pas garanti la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires, violant ainsi le principe de bonne gestion financière prévu à l'article II.19.1, sous f), de la convention de subvention.
21 Aux termes de l'article 1er de la décision attaquée, « [la requérante] doit à la Commission la somme de 4 013 520,16 euros [...] représentant le principal, majorée d'intérêts de retard de 314 044,21 euros [...] au 31 mars 2023, soit un total de 4 327 564,37 euros [...] à la date susmentionnée, majoré de 384,86 euros [...] par jour de retard supplémentaire à compter du 1er avril 2023. »
22 L'article 2 de la décision attaquée indique que les montants visés à son article 1er, comprenant le principal et les intérêts jusqu'à la date de paiement, doivent être versés sur un compte bancaire de la Commission.
23 Selon l'article 3 de la décision attaquée, à défaut de paiement intégral dans un délai de quinze jours à compter de la réception de cette décision, attestée par l'accusé de réception, le paiement fera l'objet d'une exécution forcée en vertu de l'article 299, troisième alinéa, TFUE.
Conclusions des parties
24 La requérante conclut, en substance, à ce qu'il plaise au Tribunal d'annuler la décision attaquée ou, de manière subsidiaire, de l'annuler partiellement en réduisant le montant à recouvrer et les intérêts correspondants.
25 La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
26 Au soutien du recours, la requérante présente trois moyens.
27 Par le premier moyen, tiré de ce que la décision attaquée serait dépourvue de fondement juridique, la requérante fait valoir, en substance, que l'article II.19.1, sous f), de la convention de subvention, lu à la lumière de l'article 30 du règlement (UE, Euratom) no 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l'Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil (JO 2012, L 298, p. 1), ne permettait pas à la Commission de considérer que les coûts qu'elle avait supportés ne respectaient pas le principe de bonne gestion financière et ne constituaient donc pas des coûts éligibles, au seul motif que les procédures d'attribution des marchés n'avaient pas garanti la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires. Elle considère qu'elle a pleinement respecté le critère d'attribution du « prix le plus bas », prévu à l'article II.9.1 de la convention de subvention, et qu'elle n'était pas tenue de respecter d'autres critères que ceux expressément prévus par cet article.
28 Dans le cadre du troisième moyen, la requérante avance qu'elle avait une confiance légitime dans le fait que, si elle organisait une procédure d'attribution des marchés liés au projet dans le respect de l'article II.9.1 de la convention de subvention, les coûts supportés dans le cadre de ces marchés seraient éligibles au titre de cette convention.
29 Étant donné que les premier et troisième moyens se chevauchent largement en ce qu'ils concernent l'interprétation des stipulations de la convention de subvention, notamment de son article II.9.1, ils seront examinés ensemble.
30 Par le deuxième moyen, la requérante allègue que la décision attaquée a été adoptée en violation du principe de proportionnalité, consacré par l'article 135 du règlement no 966/2012 et par l'article II.27.6 de la convention de subvention, de l'article II.25.4 de ladite convention ainsi que de l'article 5 TFUE et des dispositions du protocole (no 2) sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité (JO 2016, C 202, p. 206).
31 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler qu'il ressort de la jurisprudence que, lorsque le juge de l'Union est saisi, en application de l'article 263 TFUE, d'un recours en annulation contre une décision de la Commission formant titre exécutoire formalisant une créance contractuelle, ce juge est compétent pour examiner ce recours eu égard à l'exercice de prérogatives de puissance publique qu'implique l'adoption d'une telle décision. Toutefois, dans le cadre de l'examen d'un tel recours, ledit juge est appelé à connaître non seulement des moyens d'annulation fondés sur des éléments de fait et de droit résultant des agissements de la Commission en tant qu'autorité administrative, mais également des moyens d'annulation fondés sur des éléments de fait et de droit résultant des relations contractuelles liant la Commission au requérant (arrêt du 16 juillet 2020, ADR Center/Commission, C‑584/17 P, EU:C:2020:576, point 88).
32 Il s'ensuit que le Tribunal est compétent pour connaître de l'ensemble des moyens avancés par la requérante en l'espèce, y compris ceux fondés sur des éléments de fait et de droit résultant des relations contractuelles liant celle-ci à la Commission établies par la convention de subvention.
Sur le premier moyen, tiré de ce que la décision attaquée serait dépourvue de fondement juridique, ainsi que sur le troisième moyen, tiré d'une violation du principe de protection de la confiance légitime
33 Dans le cadre du premier moyen, la requérante fait valoir que l'article II.19.1, sous f), de la convention de subvention, invoqué par la Commission au considérant 17 de la décision attaquée en tant que fondement de la « sanction » consistant dans le remboursement de l'ensemble du financement ne saurait, en réalité, servir de fondement juridique à cette décision. Selon cet article, l'éligibilité des coûts effectivement supportés par la requérante en tant que bénéficiaire de la convention de subvention serait soumise à la condition selon laquelle ces coûts doivent être raisonnables, justifiés et conformes au principe de bonne gestion financière. En l'espèce, la Commission ne contesterait pas le fait que les exigences relatives au caractère raisonnable et justifié des coûts ont été respectées, mais invoquerait uniquement le non-respect de l'exigence de bonne gestion financière au vu de la manière dont les procédures de passation des marchés ont été organisées. Or, il ressortirait de la définition du principe de bonne gestion financière figurant à l'article 30 du règlement no 966/2012, au titre duquel la subvention pour le projet aurait été octroyée, que ce principe n'est pas lié à la garantie de la transparence, de la concurrence et de l'égalité de traitement, comme le soutiendrait à tort la Commission, mais exclusivement au respect des principes d'économie, d'efficience et d'efficacité définis à l'article 30, paragraphe 2, de ce règlement.
34 En l'espèce les coûts effectivement supportés par la requérante respecteraient, selon cette dernière, ces trois principes. Premièrement, le principe d'économie exigerait que les « moyens mis en œuvre par l'institution dans le cadre de la réalisation de ses activités [soient] rendus disponibles en temps utile, dans les quantités et qualités appropriées et au meilleur prix ». Il n'aurait pas été violé dès lors que les travaux prévus par la convention de subvention auraient été achevés un mois avant la date stipulée dans ladite convention. Le rapport d'audit n'aurait pas analysé ce principe ni prouvé que les prix effectivement payés par la requérante pour les moyens nécessaires à la réalisation du projet n'étaient pas les meilleurs. La simple suspicion que les procédures d'attribution des marchés n'auraient pas assuré dans leur intégralité la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement ne prouverait pas que des soumissionnaires auraient pu réaliser les travaux faisant l'objet de la convention de subvention à moindre prix. En outre, le prix total pour lequel ces travaux ont été réalisés serait inférieur au prix estimé par l'agence, figurant au considérant 3 de la décision attaquée et dans l'analyse de budget antérieure à la signature de cette convention. Ceci laisserait présumer que le prix des travaux a été le meilleur. Deuxièmement, le principe d'efficience, visant « le meilleur rapport entre les moyens mis en œuvre et les résultats obtenus », aurait été respecté, car il serait établi que les travaux ont été dûment achevés et que les coûts totaux éligibles acceptés par l'agence pour les moyens utilisés n'ont pas dépassé la valeur estimée figurant dans la convention de subvention. Troisièmement, le principe d'efficacité visant « l'atteinte des objectifs spécifiques fixés et l'obtention des résultats escomptés » aurait été respecté dès lors que le projet serait fonctionnel, qu'il aurait été achevé avant la date limite, qu'il répondrait aux objectifs spécifiques de la convention de subvention et qu'il n'y aurait aucune preuve d'un défaut dans les travaux.
35 Selon la requérante, la Commission ne pouvait donc pas fonder la décision attaquée sur l'article II.19.1, sous f), de la convention de subvention. Les griefs de la Commission, tirés de la transparence, de la concurrence et de l'égalité de traitement, n'auraient pu être invoqués qu'au titre de l'article II.9.1 de cette convention. Or, ce dernier article n'aurait pas été invoqué par la Commission en tant que fondement de la décision attaquée.
36 Par son troisième moyen, tiré d'une violation du principe de protection de la confiance légitime, la requérante fait valoir qu'elle avait une confiance légitime dans le fait que, si elle organisait une procédure d'attribution des marchés dans le respect de l'article II.9.1 de la convention de subvention, ce qu'elle aurait fait en appliquant le critère du prix le plus bas, elle ne s'exposerait pas au risque de voir ses dépenses déclarées inéligibles. La requérante considère comme étant contraire à ce principe l'interprétation de la Commission selon laquelle, compte tenu de la complexité des marchés conclus dans le cadre du projet, elle aurait dû également mettre en place d'autres critères que ceux expressément prévus par l'article II.9.1 de la convention de subvention, par exemple un critère relatif au chiffre d'affaires des soumissionnaires. Un tel critère ne figurerait pas à l'article II.9.1 de la convention de subvention et ne saurait donc fonder l'application d'une « sanction ». L'article II.9.1 de cette convention devrait être interprété en ce sens que la requérante avait le droit de choisir l'un ou l'autre des critères d'attribution prévus par cet article, à savoir soit celui du meilleur rapport qualité-prix, soit celui du prix le plus bas, sans que l'on puisse la « sanctionner » pour ce choix. Dans sa lettre du 5 mars 2021, l'agence aurait confirmé que la requérante avait respecté l'article II.9.1 de la convention de subvention, ce qui serait également implicitement confirmé par le fait que le recouvrement de la totalité du financement n'était pas fondé sur l'article II.9.2 de ladite convention. Dans ces conditions, la requérante aurait pu légitimement s'attendre à ne faire l'objet d'aucune « sanction » impliquant le remboursement de la totalité du financement. Selon la requérante, la convention de subvention aurait dû être rédigée en termes suffisamment clairs et explicites pour ne laisser place à aucun doute quant à l'interprétation des obligations qu'elle devait remplir et des conséquences qu'elle subirait en cas d'inexécution ou d'exécution inappropriée ou insuffisante de ces obligations.
37 La Commission conteste les arguments de la requérante.
38 Par les premier et troisième moyens, la requérante conteste l'interprétation des stipulations de la convention de subvention, notamment de ses articles II.9.1 et II.19.1, sous f), retenue par la Commission.
39 Dans le cadre du premier moyen, la requérante fait valoir, en substance, que l'article II.19.1, sous f), de la convention de subvention ne permettait pas à la Commission de considérer que les coûts qu'elle avait supportés ne respectaient pas le principe de bonne gestion financière et ne constituaient donc pas des coûts éligibles, au seul motif que les procédures d'attribution des marchés n'avaient pas garanti la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires. La requérante considère que le principe de bonne gestion financière visé à l'article II.19.1, sous f), de ladite convention, n'établit pas d'obligation de garantir la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires en cas de passation de marchés dans le cadre de la mise en œuvre du projet. Elle fait valoir qu'elle s'est pleinement conformée à l'article II.9.1 de cette convention en attribuant les marchés selon l'un des deux critères prévus par cet article qui, seul, régirait les marchés liés au projet visé par ladite convention, à savoir le critère du « prix le plus bas », et qu'elle n'était pas tenue de respecter d'autres critères que ceux expressément prévus par cet article.
40 Dans le cadre du troisième moyen, la requérante soutient, en substance, qu'elle avait une confiance légitime dans le fait que, si elle organisait une procédure d'attribution des marchés liés au projet dans le respect de l'article II.9.1 de la convention de subvention, les coûts supportés dans le cadre de ces marchés seraient éligibles au titre de cette convention.
41 À cet égard, il importe de souligner, à titre liminaire, que la requérante ne formule aucun argument mettant en cause les conclusions de l'audit externe sur lesquelles la Commission s'est fondée, en particulier le constat selon lequel les procédures d'attribution des marchés qu'elle a menées n'ont pas garanti la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires. En d'autres termes, la requérante ne remet en cause que la qualification juridique du fait que, au cours desdites procédures, elle n'a pas garanti la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires. Il s'ensuit que, dans le cadre de l'examen des moyens avancés par la requérante, le Tribunal se limitera à apprécier si la décision attaquée est affectée, comme le prétend la requérante, d'une erreur de droit.
Sur l'interprétation de l'article II.9.1 de la convention de subvention
42 La requérante fait valoir, en substance, que, en ayant retenu comme critère d'attribution celui du prix le plus bas, elle s'est conformée à l'article II.9.1 de la convention de subvention et que, dès lors, la Commission n'avait pas le droit de déclarer inéligibles les coûts afférents aux marchés qu'elle a attribués. Elle est d'avis que l'article II.9.5, premier alinéa, premier tiret, de cette convention ne prévoit l'inéligibilité totale des coûts afférents au contrat concerné que dans l'hypothèse du non-respect des obligations découlant de l'article II.9.1 de ladite convention et souligne que la Commission n'a pas invoqué l'article II.9.5, premier alinéa, premier tiret, de cette convention comme fondement juridique de la décision attaquée.
43 La requérante avance encore que l'agence aurait expressément reconnu qu'elle avait mis en œuvre une procédure, par laquelle elle a établi des règles de participation aux appels d'offres selon le critère du prix le plus bas, conformément à l'article II.9.1 de la convention de subvention, et aurait donc admis que le choix de ce critère n'était pas contraire à cet article.
44 À cet égard, il importe de constater que, contrairement à ce que fait valoir la requérante, l'agence, dans sa lettre du 5 mars 2021, n'a pas estimé que les procédures d'attribution des marchés avaient été organisées conformément à l'article II.9.1 de la convention de subvention. Dans ladite lettre, l'agence a reconnu les efforts de la requérante pour mettre en place des règles internes pour l'attribution des marchés aux soumissionnaires offrant les prix les plus bas, conformément à l'article II.9.1 de la convention de subvention, mais a constaté que les procédures d'attribution des marchés menées par la requérante n'avaient pas garanti la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires, en violation du principe de bonne gestion financière prévu à l'article II.19.1, sous f), de cette convention (voir point 15 ci-dessus).
45 L'article II.9 de la convention de subvention, intitulé « Attribution de marchés nécessaires pour la mise en œuvre de l'action », se lit comme suit :
« II.9.1 Lorsque la mise en œuvre d'une action implique l'acquisition de biens, de travaux ou de services, les bénéficiaires attribuent le marché au soumissionnaire offrant le meilleur rapport qualité/prix ou, selon le cas, au soumissionnaire offrant le prix le plus bas. [...]
II.9.2 Les bénéficiaires agissant en leur qualité d'autorités contractantes au sens de la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services ou d'entités adjudicatrices au sens de la directive 2004/17/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux respecteront les règles nationales applicables concernant les marchés publics.
II.9.3 Les bénéficiaires sont seuls responsables de la mise en œuvre de l'action et du respect des dispositions de la convention de subvention. Les bénéficiaires assurent que tout contrat de marché contient des dispositions prévoyant que le contractant n'a pas de droit vis-à-vis de l'agence [...]
[...]
II.9.5 Lorsque, conformément à l'article 3, sous a), la subvention prend la forme d'un remboursement des coûts éligibles :
– [s]i un bénéficiaire ne respecte pas une de ses obligations conformément à l'article II.9.1, les coûts afférents au contrat concerné sont inéligibles ;
[...] ».
46 En l'espèce, doit être rejetée la thèse défendue par la requérante selon laquelle, en substance, l'article II.9.5, premier alinéa, premier tiret, de la convention de subvention est exhaustif en ce sens que c'est seulement dans le cas du non-respect des obligations prévues à l'article II.9.1 de cette convention que les coûts afférents au contrat concerné peuvent être considérés comme étant totalement inéligibles. Cette thèse reviendrait à affirmer que, pour autant qu'un bénéficiaire fait le choix d'attribuer un marché soit au soumissionnaire offrant le meilleur rapport qualité/prix, soit au soumissionnaire offrant le prix le plus bas, il ne doit plus respecter aucune autre condition lors de l'organisation des marchés.
47 Or, le seul fait d'avoir retenu comme critère d'attribution celui du meilleur rapport qualité/prix ou, comme en l'espèce, celui du prix le plus bas n'est pas suffisant en soi pour assurer que le contrat soit effectivement attribué au soumissionnaire offrant le meilleur rapport qualité/prix ou à celui offrant le prix le plus bas. Comme le met en exergue le rapport d'audit en l'espèce (voir point 7 ci-dessus), il est encore nécessaire que, lors de l'attribution du marché selon l'un de ces critères, certains principes de base soient respectés. En effet, une procédure d'attribution des marchés qui n'est pas organisée de manière transparente, qui n'assure pas une concurrence suffisamment large entre les soumissionnaires intéressés et qualifiés ou qui permet que les soumissionnaires soient traités de manière différente ne saurait être considérée comme ayant réellement atteint le meilleur rapport qualité/prix ou le prix le plus bas.
48 Ainsi, c'est à juste titre que la Commission fait valoir que le choix de la requérante de passer les marchés pour la mise en œuvre de l'action selon le critère du prix le plus bas, en application de l'article II.9.1 de la convention de subvention, ne l'exonérait pas du respect des autres conditions d'éligibilité des coûts prévues par cette convention.
49 Il s'ensuit que le prétendu respect de l'article II.9.1 de la convention de subvention par la requérante n'empêchait pas, par principe, que la Commission considère que les coûts afférents aux marchés organisés par la requérante étaient inéligibles au titre d'autres dispositions de la convention de subvention et notamment celles de son article II.19.1, sous f).
Sur l'interprétation de l'article II.19.1, sous f), de la convention de subvention
50 S'agissant de l'article II.19.1, sous f), de la convention de subvention, sur lequel la Commission s'est fondée pour conclure à l'inéligibilité des coûts, les parties sont en désaccord, en substance, sur la question de savoir si le fait, non contesté en l'espèce (voir point 41 ci-dessus), que les procédures d'attribution organisées par la requérante dans le cadre de la mise en œuvre du projet n'ont pas garanti la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires signifie que ces coûts ne respectent pas le principe de bonne gestion financière et ne sont dès lors pas éligibles, conformément à cette disposition.
51 La requérante considère, en effet, que le principe de bonne gestion financière mentionné à l'article II.19.1, sous f), de la convention de subvention doit être compris conformément à la définition qu'en donne l'article 30 du règlement n° 966/2012. Selon la requérante, cette définition ne vise que les principes d'économie, d'efficience et d'efficacité, qu'elle aurait respectés en l'espèce, mais non la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires.
52 De plus, la requérante considère qu'elle a respecté le principe d'économie, dès lors que, premièrement, les travaux prévus par la convention de subvention auraient été achevés un mois avant la date stipulée dans cette convention, deuxièmement, la Commission n'aurait pas apporté la preuve, en se bornant à soutenir que la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires n'avaient pas été respectées, que les prix payés par la requérante dans le cadre des marchés qu'elle a conclus n'étaient pas les meilleurs et, troisièmement, que le prix total pour lequel les travaux faisant l'objet de ladite convention ont été réalisés était inférieur au prix estimé par l'agence et figurant dans l'analyse de budget antérieure à la signature de cette même convention.
53 Tout d'abord, à l'instar de la Commission, il y a lieu de relever que les règles internes pour l'attribution des marchés liés au projet, que la requérante a adoptées, prévoient, à l'article 2, paragraphe 1, que « les principes suivants sont pris en compte lors de l'adoption de toute décision [de sélection des offres] : a) la non-discrimination ; b) l'égalité de traitement ; c) la reconnaissance mutuelle ; d) la transparence ; e) la proportionnalité ; f) l'efficacité de l'utilisation des fonds publics [et] g) l'obligation de rendre compte ». Force est donc de constater que la requérante elle-même a considéré que certains principes de base, y compris notamment la transparence et l'égalité de traitement, devaient être respectés lors de l'attribution de marchés à des tiers.
54 Ensuite, il convient de rappeler que l'article 310, paragraphe 5, TFUE, et l'article 317, premier alinéa, TFUE, prévoient que le budget de l'Union est exécuté conformément au principe de bonne gestion financière. Il s'agit donc d'un principe issu du droit primaire de l'Union.
55 Au rang du droit dérivé de l'Union, l'article 30, paragraphe 1, du règlement no 966/2012, prévoit, quant à lui, que les crédits sont utilisés conformément au principe de bonne gestion financière, à savoir conformément aux principes d'économie, d'efficience et d'efficacité. En outre, selon l'article 30, paragraphe 2, premier alinéa, de ce règlement, le principe d'économie prescrit que les moyens mis en œuvre par l'institution dans le cadre de la réalisation de ses activités sont rendus disponibles en temps utile, dans les quantités et qualités appropriées et au meilleur prix.
56 Enfin, l'article II.19.1, sous f), de la convention de subvention prévoit ce qui suit :
« Les “coûts éligibles” de l'action sont des coûts effectivement encourus par le bénéficiaire qui satisfont aux critères suivants :
[...]
(f) ils sont raisonnables, justifiés et respectent le principe de bonne gestion financière, en particulier en ce qui concerne l'économie et l'efficience. »
57 Comme le fait valoir à juste titre la Commission, la charge de prouver le respect des conditions d'éligibilité des coûts et donc, en l'espèce, le respect du principe de bonne gestion financière pèse sur la requérante. En effet, selon la jurisprudence, en présence d'indices concrets de l'existence d'un risque que les conditions d'éligibilité des coûts ne soient pas remplies, la charge de prouver que lesdites conditions sont effectivement remplies pèse sur le bénéficiaire de la convention de subvention (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 22 octobre 2020, EKETA/Commission, C‑273/19 P, non publié, EU:C:2020:852, point 74). Tel est le cas en l'espèce, l'audit externe ayant relevé un nombre de points concrets sur lesquels les procédures de passation de marchés organisées par la requérante dans le cadre de la mise en œuvre du projet semblaient contraires au principe de bonne gestion financière. Ainsi qu'il résulte du point 7 ci-dessus, l'auditeur a notamment relevé que les procédures de passation de marchés n'assuraient pas que des soumissionnaires provenant d'une zone géographique plus étendue avaient pu participer auxdites procédures, mais que, au contraire, dans certains cas, les invitations à soumettre des offres n'avaient été adressées qu'à des fournisseurs locaux préidentifiés. De plus, s'agissant de certains des marchés audités, il n'était pas assuré qu'un minimum de trois soumissionnaires était éligible, que des conditions techniques et financières minimales avaient été appliquées, que des fournisseurs présélectionnés avaient été choisis selon une procédure garantissant le meilleur rapport qualité/prix, ni que les fournisseurs potentiels qui avaient participé à l'élaboration du budget du projet étaient exclus d'office de la procédure de passation des marchés.
58 Or, comme relevé au point 47 ci-dessus, une procédure d'attribution des marchés qui n'est pas organisée de manière transparente, qui n'assure pas une concurrence suffisamment large entre les soumissionnaires intéressés et qualifiés ou qui permet que les soumissionnaires soient traités de manière différente ne saurait être considérée comme ayant réellement atteint le meilleur rapport qualité/prix ou prix le plus bas. Par suite, c'est à juste titre que la Commission fait valoir qu'une telle procédure d'attribution des marchés dans laquelle la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement ne sont pas garanties ne saurait aboutir au meilleur prix, au sens de l'article 30, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 966/2012, ni au meilleur rapport entre les moyens mis en œuvre et les résultats obtenus, au sens du deuxième alinéa de ce paragraphe 2.
59 Par suite, il y a lieu de rejeter l'argument de la requérante selon lequel le principe de bonne gestion financière mentionné à l'article II.19.1, sous f), de la convention de subvention, ne requérait pas, lors de la passation des marchés dans le cadre de la mise en œuvre du projet, le respect de certains principes de base, tels que la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires, afin d'assurer, notamment, que les moyens mis en œuvre soient rendus disponibles au meilleur prix.
60 La charge de prouver le respect du principe de bonne gestion financière pesant, en l'espèce, sur la requérante (voir point 57 ci-dessus), force est de constater que celle-ci ne présente pas d'arguments concrets remettant en cause les conclusions de l'audit externe sur lesquelles la Commission s'est fondée, en particulier le constat selon lequel les procédures d'attribution des marchés menées par la requérante n'ont pas garanti la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires (voir point 41 ci-dessus).
61 S'agissant des trois arguments concrets avancés par la requérante pour démontrer qu'elle a respecté le principe d'économie (voir point 34 ci-dessus), il y a lieu de considérer ce qui suit.
62 Premièrement, le fait que les travaux prévus par la convention de subvention ont été achevés un mois avant la date stipulée dans cette convention ne permet nullement d'assurer que la requérante a conclu les contrats pour la réalisation de ces travaux au meilleur prix.
63 Deuxièmement, contrairement à ce que fait valoir la requérante, il lui incombait de prouver (voir points 57 et 60 ci-dessus) que les prix, pour lesquels elle avait conclu les contrats à la suite des marchés organisés par elle dans le cadre de la mise en œuvre du projet, étaient effectivement les meilleurs. Or, étant donné qu'une procédure d'attribution de marchés dans laquelle la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement ne sont pas garanties ne saurait aboutir au meilleur prix, au sens de l'article 30, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 966/2012 (voir points 47 et 58 ci-dessus), et en l'absence d'arguments concrets allant dans le sens contraire (voir points 41 et 60 ci-dessus), la requérante n'a pas apporté une telle preuve.
64 Troisièmement, comme le fait valoir à juste titre la Commission, l'estimation du budget pour l'action relève de la seule responsabilité de la requérante. L'agence s'est limitée à reprendre, dans la convention de subvention, cette estimation de budget élaborée par la requérante.
65 Ces trois arguments concrets présentés par la requérante afin de démontrer qu'elle a respecté le principe d'économie n'étant donc pas non plus aptes à démontrer qu'elle a respecté le principe de bonne gestion financière, il y a lieu de conclure que cette dernière n'est pas parvenue à prouver que le montant de la subvention, dont la Commission exige le remboursement, correspond à des coûts éligibles, au sens de la convention de subvention, notamment de son article II.19.1, sous f).
Sur le principe de protection de la confiance légitime
66 Pour ce qui est du principe de protection de la confiance légitime, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, ce principe s'inscrit parmi les principes fondamentaux de l'Union. Le droit de se prévaloir de ce principe s'étend à tout justiciable à l'égard duquel une institution de l'Union a fait naître des espérances fondées. Constituent des assurances susceptibles de faire naître de telles espérances, quelle que soit la forme sous laquelle ils sont communiqués, des renseignements précis, inconditionnels, concordants et émanant de sources autorisées et fiables. En revanche, nul ne peut invoquer une violation dudit principe en l'absence d'assurances précises que lui aurait fournies l'administration (voir arrêt du 14 mars 2013, Agrargenossenschaft Neuzelle, C‑545/11, EU:C:2013:169, points 23 à 25 et jurisprudence citée).
67 À cet égard, il suffit de constater que, en l'espèce, aucun renseignement précis, inconditionnel et concordant allant dans le sens allégué par la requérante n'a été fourni par une source autorisée et fiable, à savoir l'agence ou la Commission. Le seul fait d'avoir signé un contrat tel que la convention de subvention en l'espèce ne saurait, en principe, constituer un tel renseignement, selon lequel ce contrat serait appliqué dans un sens qui ne découle pas de lui-même, et ce à plus forte raison si une telle interprétation du contrat était contraire à ses dispositions (voir, en ce sens, arrêt du 26 avril 1988, Krücken, 316/86, EU:C:1988:201, point 23 et jurisprudence citée).
68 En outre, comme le fait valoir à juste titre la Commission, ni la lettre de l'agence du 16 juillet 2018, par laquelle celle-ci a informé la requérante de ce qu'elle considérait le montant total de 4 877 832,97 euros comme des coûts éligibles du projet, justifiant le paiement d'une contribution de l'Union de 4 146 158,02 euros, ni le versement du solde de cette contribution à la requérante (voir point 6 ci-dessus) ne peuvent être interprétés comme une confirmation irrévocable de l'éligibilité desdits coûts. L'article II.27.6, premier alinéa, de la convention de subvention prévoit en effet que, sur la base des constatations finales d'un audit commandé par la Commission ou l'agence, celles-ci peuvent prendre toute mesure jugée nécessaire, y compris, après le paiement du solde, le recouvrement de tout ou partie des paiements effectués, conformément à l'article II.26 de cette convention. La convention de subvention prévoyant ainsi expressément la possibilité pour la Commission ou pour l'agence de procéder à un recouvrement même après le paiement du solde de la subvention à la suite de l'appréciation de l'éligibilité des coûts déclarés, la lettre de l'agence du 16 juillet 2018 et le versement du solde n'étaient pas susceptibles de faire naître des espérances fondées à l'égard de la requérante.
69 Enfin, le ministère roumain de gestion des fonds de l'Union n'étant pas une source autorisée, au sens de la jurisprudence citée au point 66 ci-dessus, dès lors qu'elle n'est pas une administration de l'Union (arrêt du 16 octobre 2019, Palo/Commission, T‑432/18, EU:T:2019:749, point 50), un quelconque renseignement de sa part ne saurait, en tout état de cause, fonder une quelconque confiance légitime à l'égard de l'Union et de ses institutions et organes.
70 Il s'ensuit que les premier et troisième moyens doivent être rejetés.
Sur le deuxième moyen, tiré d'une violation du principe de proportionnalité
71 Par son deuxième moyen, la requérante invoque une violation du principe de proportionnalité. Selon elle, il résulte de l'article II.27.6 de la convention de subvention que, dans le cas de projets achevés dans les délais et de manière appropriée, il est possible de ne pas recouvrer la totalité du montant octroyé, mais seulement une partie de celui-ci, dans le respect du principe de proportionnalité. Elle déduit du second alinéa de cette stipulation que, dans le cas où l'audit est postérieur à l'achèvement du projet et au paiement du solde, le recouvrement du montant financé ne peut être que partiel. L'article 135, paragraphe 4, du règlement no 966/2012, confirmerait cette interprétation et ferait expressément référence à l'obligation de respecter le principe de proportionnalité lors de la réduction du montant d'une subvention ou du recouvrement de montants indûment versés.
72 La récupération de la totalité du financement décidée par la Commission serait de nature à porter une atteinte disproportionnée aux droits et aux intérêts légitimes de la requérante, qui serait obligée de supporter personnellement, sur son propre patrimoine, tous les coûts d'un projet d'intérêt européen qui ne la concernerait pas directement, mais qui servirait l'intérêt public de l'Union. En outre, bien que le projet ait été dûment mis en œuvre et achevé un mois avant la date limite fixée dans la convention de subvention, tous les coûts auraient été déclarés, à tort, inéligibles et le recouvrement de l'ensemble du financement aurait été ordonné. Ce recouvrement ferait peser une charge excessive sur la requérante qui, bien qu'ayant réalisé le projet, serait obligée de rembourser la totalité du financement, ce qui constituerait une « sanction » déraisonnable au regard du principe de proportionnalité. Il serait contraire à ce principe ainsi qu'au principe d'équité qu'un opérateur économique privé supporte l'intégralité du coût d'un projet d'intérêt européen ne servant pas les intérêts de cet opérateur, mais avant tout ceux de l'Union.
73 Même si le Tribunal devait estimer que la requérante a violé certaines des obligations prévues dans la convention de subvention, il y aurait lieu d'annuler partiellement la décision attaquée et de réduire le montant à recouvrer et les intérêts correspondants.
74 La requérante considère encore que, au titre du principe de proportionnalité qui serait également consacré contractuellement à l'article II.25.4 de la convention de subvention, la Commission aurait dû analyser dans quelle proportion la mise en œuvre de l'action était inappropriée, à savoir dans quelle proportion la procédure d'attribution mise en œuvre par le bénéficiaire a affecté la bonne gestion financière de chaque action pour laquelle des contrats ont été conclus avec des tiers et dans quelle proportion les obligations en cause ont été violées. Or, la Commission n'aurait pas analysé ces questions liées à la proportionnalité, mais aurait simplement décidé de recouvrer la totalité du montant couvert par la convention de subvention.
75 La requérante ajoute d'« autres circonstances à prendre en compte par le Tribunal et qui [seraient] particulièrement pertinentes en ce qui concerne la proportionnalité de la mesure de recouvrement de l'intégralité du financement ». Elle avance que le projet était le premier concernant une aire de stationnement sécurisée en Europe de l'Est et que la qualité de cette aire de stationnement, réalisée grâce au financement visé par la convention de subvention, était reconnue. Pendant la pandémie de COVID-19, ladite aire de stationnement aurait joué un rôle important, tout comme elle le ferait dans le contexte de la guerre en Ukraine, étant donné qu'elle serait le seul endroit sur une route faisant partie du réseau transeuropéen de transport (RTE-T) où les convois d'équipements militaires et de transport de munitions de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) pourraient s'arrêter. L'exécution forcée de la décision attaquée conduirait à l'insolvabilité et même à la faillite de la requérante. Il en résulterait la fermeture totale de cette aire de stationnement, qui serait pourtant pleinement fonctionnelle, ainsi que la perte de leur emploi pour les 50 employés de la requérante.
76 La Commission conteste les arguments de la requérante.
77 Le principe de proportionnalité constitue un principe général du droit de l'Union, qui est consacré par l'article 5, paragraphe 4, TUE. Ce principe exige que les actes des institutions de l'Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre le but recherché. Il a vocation à régir tous les modes d'action de l'Union, qu'ils soient ou non contractuels (voir arrêt du 18 novembre 2015, Synergy Hellas/Commission, T‑106/13, EU:T:2015:860, points 88 et 89 et jurisprudence citée).
78 Comme le fait valoir à juste titre la Commission, par le deuxième moyen, la requérante remet en cause, en substance, le montant que la Commission cherche à recouvrer auprès d'elle et considère que la Commission n'aurait dû en recouvrer qu'une partie.
79 En revanche, la requérante ne présente pas d'arguments par lesquels elle contesterait spécifiquement le fait que la Commission a formalisé sa demande de remboursement dans la décision attaquée, à savoir dans une décision établissant une obligation pécuniaire formant titre exécutoire, au sens de l'article 299 TFUE.
80 Par suite, il y a lieu de vérifier si les arguments avancés par la requérante démontrent effectivement que la Commission a violé le principe de proportionnalité en exigeant le remboursement intégral de la subvention à concurrence des coûts qu'elle a estimés inéligibles en vertu de la convention de subvention, pour non-respect du principe de bonne gestion financière.
81 À cet égard, il convient de relever que la Commission est tenue, aux termes de l'article 317 TFUE, de respecter le principe de bonne gestion financière. Elle veille également à la protection des intérêts financiers de l'Union dans l'exécution du budget de celle-ci. Il en est de même en matière contractuelle, dès lors que les subventions accordées par la Commission sont issues du budget de l'Union. Selon un principe fondamental régissant les aides accordées par l'Union, celle-ci ne peut subventionner que des dépenses effectivement engagées (arrêts du 28 février 2019, Alfamicro/Commission, C‑14/18 P, EU:C:2019:159, point 65, et du 16 juillet 2020, ADR Center/Commission, C‑584/17 P, EU:C:2020:576, point 100).
82 Par conséquent, la Commission ne peut, sans porter atteinte auxdits principes établis par le traité FUE, approuver une dépense à la charge du budget de l'Union sans fondement juridique. Or, dans le contexte d'une subvention, c'est la convention relative à cette subvention qui régit les conditions d'octroi et d'utilisation de celle-ci et, plus particulièrement, les clauses relatives à la détermination du montant de cette subvention en fonction des coûts déclarés par le cocontractant de la Commission (arrêts du 28 février 2019, Alfamicro/Commission, C‑14/18 P, EU:C:2019:159, point 66, et du 16 juillet 2020, ADR Center/Commission, C‑584/17 P, EU:C:2020:576, point 101).
83 Partant, si les coûts déclarés par le bénéficiaire ne sont pas éligibles au titre de la convention de subvention concernée, notamment parce qu'ils ont été jugés non vérifiables et/ou non fiables, la Commission n'a d'autre choix que de procéder au recouvrement de la subvention à concurrence des montants non justifiés, dès lors que, sur la base du fondement juridique que constitue cette convention de subvention, cette institution n'est autorisée à liquider, à la charge du budget de l'Union, que des sommes dûment justifiées (arrêts du 28 février 2019, Alfamicro/Commission, C‑14/18 P, EU:C:2019:159, point 67, et du 16 juillet 2020, ADR Center/Commission, C‑584/17 P, EU:C:2020:576, point 102).
84 Il découle de cette jurisprudence que, lorsqu'il s'avère que, conformément à la convention de subvention en cause, des coûts doivent être considérés comme étant non éligibles, la demande de remboursement de la subvention à concurrence de ces coûts représente une mesure appropriée et nécessaire, celle-ci étant la seule que la Commission peut adopter (voir, en ce sens, arrêt du 28 février 2019, Alfamicro/Commission, C‑14/18 P, EU:C:2019:159, point 70).
85 Par suite, dès lors que la requérante n'est pas parvenue, en l'espèce, à démontrer que les coûts à concurrence desquels la Commission exige le remboursement de la subvention constituent des coûts éligibles, au sens de la convention de subvention (voir point 65 ci-dessus), la décision attaquée constitue une mesure appropriée et nécessaire qui ne viole donc pas le principe de proportionnalité.
86 Les arguments présentés par la requérante ne remettent pas en cause cette conclusion.
87 En premier lieu, la requérante conteste l'applicabilité en l'espèce de l'arrêt du 28 février 2019, Alfamicro/Commission (C‑14/18 P, EU:C:2019:159), invoqué par la Commission dans le mémoire en défense. La requérante considère que cet arrêt ne concerne que la notion de « dépenses effectivement engagées » et ne s'applique qu'à des dépenses invérifiables ou injustifiées.
88 Il ressort, certes, du point 67 de l'arrêt du 28 février 2019, Alfamicro/Commission (C‑14/18 P, EU:C:2019:159), cité au point 83 ci-dessus, que la situation en cause dans cette affaire concernait des « coûts déclarés par le bénéficiaire [qui] ne sont pas éligibles au titre de la convention de subvention concernée, parce qu'ils ont été jugés non vérifiables et/ou non fiables ».
89 Toutefois, l'on ne saurait déduire de cette formulation précise que les cas dans lesquels les coûts ont été jugés non vérifiables et/ou non fiables sont les seuls dans lesquels la Commission serait tenue, au titre du principe de la bonne gestion financière consacré à l'article 317 TFUE, de procéder au recouvrement de la subvention.
90 Premièrement, il découle du point 66 de l'arrêt du 28 février 2019, Alfamicro/Commission (C‑14/18 P, EU:C:2019:159), cité au point 82 ci-dessus, que la Commission ne peut pas approuver une dépense à la charge du budget de l'Union sans fondement juridique qui, dans le contexte d'une subvention, se trouve dans la convention relative à la subvention en cause. Les dispositions d'une telle convention de subvention régissent les conditions d'octroi et d'utilisation de celle-ci. Il n'y a aucune raison, à cet égard, de traiter de manière différente les différents types de conditions d'octroi et d'utilisation d'une subvention qui sont déterminées par la convention de subvention en cause.
91 Deuxièmement, il y a lieu de rappeler que c'est l'article II.19.1, sous f), de la convention de subvention même qui prévoit que, pour être éligibles, les coûts doivent être « raisonnables, justifiés et respecte[r] le principe de bonne gestion financière ». En outre, l'article II.19.1, sous d), de ladite convention exige que les coûts doivent être « identifiables et vérifiables ». Il s'ensuit que le respect du principe de bonne gestion financière est exigé dans le même article de la convention de subvention qui prévoit également la condition relative au caractère vérifiable et justifié des coûts, ce qui milite plutôt en faveur de traiter de la même manière ce principe et cette condition.
92 Troisièmement, il convient de relever qu'il a déjà été fait application de l'arrêt du 28 février 2019, Alfamicro/Commission (C‑14/18 P, EU:C:2019:159), de manière plus générale aux « coûts déclarés par un bénéficiaire [qui] ne sont pas éligibles au titre de la convention de subvention concernée » (arrêt du 19 septembre 2019, BTC/Commission, T‑786/17, non publié, EU:T:2019:630, point 98).
93 Quatrièmement, il serait paradoxal de considérer, comme le préconise la requérante, que le principe de bonne gestion financière exige de la Commission de demander le remboursement d'une subvention dans le cas où des dépenses s'avèrent invérifiables ou injustifiées, mais pas dans le cas de dépenses qui s'avèrent contraires à ce principe même.
94 En deuxième lieu, la requérante invoque l'article II.27.6 de la convention de subvention, intitulé « Effets des constatations de l'audit » qui se lit comme suit :
« Sur la base des constatations finales de l'audit, la Commission ou l'agence peut prendre toute mesure jugée nécessaire, y compris le recouvrement au moment du paiement du solde ou, après le paiement de celui-ci, de tout ou partie des paiements effectués par elle, conformément à l'article II.26.
Dans le cas de constatations finales d'un audit effectué après le paiement du solde, le montant à recouvrer correspond à la différence entre le montant final révisé de la subvention au bénéficiaire concerné, déterminé conformément à l'article II.25, et le montant total versé au bénéficiaire concerné dans le cadre de la convention pour la mise en œuvre de ses activités. »
95 La requérante considère qu'il résulte de cet article que, dans le cas de projets achevés dans les délais prévus et de manière appropriée, il est possible de ne pas recouvrer la totalité du montant octroyé au titre de la convention de subvention, mais seulement une partie de celui-ci, dans le respect du principe de proportionnalité. Selon elle, conformément au second alinéa de l'article II.27.6 de la convention de subvention, le recouvrement partiel du montant financé serait la règle lorsque l'audit est postérieur à l'achèvement du projet et au paiement du solde.
96 L'argument de la requérante procède d'une lecture erronée de l'article II.27.6 de la convention de subvention. Cet article précise la manière dont la Commission peut effectuer un recouvrement, si cela s'avère nécessaire, dans le cas où le montant final de la subvention dû au bénéficiaire, conformément à cette convention, a été révisé.
97 Le second alinéa de l'article II.27.6 de la convention de subvention, sur lequel se fonde la requérante, prévoit, en effet, un mode de calcul précis pour les cas dans lesquels les constatations finales d'un audit n'interviennent qu'après le paiement du solde. Il dispose que le montant à recouvrer correspond à la différence entre le montant déjà versé au bénéficiaire et le montant final révisé de la subvention à la suite de l'audit. Il ne dit cependant rien sur la question de savoir comment ce montant final révisé de la subvention doit être déterminé.
98 Le premier alinéa de l'article II.27.6 de la convention de subvention qui établit la règle générale selon laquelle la Commission ou l'agence, à la suite des constatations finales d'un audit, peut prendre toute mesure jugée nécessaire, y compris le recouvrement (au moment du paiement du solde ou après le paiement de celui-ci) de tout ou partie des paiements effectués par elle, ne se prononce pas davantage sur la question de savoir comment il faut déterminer le montant révisé de la subvention consécutivement à l'audit.
99 Les arguments de la requérante tirés de l'article II.27.6 de la convention de subvention doivent donc être écartés.
100 En troisième lieu, la requérante avance que l'article 135, paragraphe 4, du règlement no 966/2012, fait expressément référence à l'obligation de respecter le principe de proportionnalité lors de la réduction du montant de la subvention ou du recouvrement des montants indûment versés. Toutefois, la requérante se limite à invoquer cette disposition dans le but de démontrer qu'il existe une obligation de respecter le principe de proportionnalité lors de la réduction du montant de la subvention ou du recouvrement des montants indûment versés, sans pour autant présenter d'argument plus spécifique par lequel elle ferait valoir que ce principe aurait obligé la Commission à prendre, en l'espèce, une décision différente. Or, la Commission ne nie pas qu'elle devait respecter ce principe lors de l'adoption de la décision attaquée.
101 En quatrième lieu, la requérante se réfère à l'article II.25.4 de la convention qui est intitulé « Réduction pour mauvaise mise en œuvre ou mise en œuvre partielle ou tardive ou violation d'obligations contractuelles », dont le premier alinéa est libellé comme suit :
« Si l'action n'est pas correctement mise en œuvre conformément à l'annexe I ou si le bénéficiaire ne remplit pas d'autres obligations découlant du présent contrat, l'agence peut réduire le montant de la subvention visée à l'article 3 proportionnellement à la mise en œuvre inappropriée de l'action ou à la gravité de la violation de ces obligations. »
102 Contrairement à ce que fait valoir la Commission, l'article II.25.4, premier alinéa, de la convention de subvention est bien applicable en l'espèce. Il est constant que, dans le présent cas, le recouvrement en cause intervient après le paiement du solde de la subvention. Comme l'avance également la requérante, ce cas est visé à l'article II.27.6, second alinéa, de ladite convention qui renvoie expressément à l'article II.25 de cette même convention (voir point 94 ci-dessus). S'il est vrai que l'article II.25.4 de la convention de subvention ne constitue pas la base juridique du recouvrement litigieux, comme le considère la Commission, force est toutefois de constater que l'article II.27.6 de cette convention qui, selon la Commission, constitue la base juridique de ce recouvrement, se réfère expressément à l'article II.25 de la convention de subvention pour ce qui est de la détermination du montant final révisé de la subvention à la suite d'un audit qui a été effectué, comme en l'espèce, après le paiement du solde de la subvention.
103 Toutefois, le non-respect de conditions d'éligibilité des coûts qui est en cause dans la présente affaire ne peut pas être considéré comme une mauvaise mise en œuvre de l'action ou comme une mise en œuvre partielle ou tardive de celle-ci, ni comme une « violation » d'obligations contractuelles, au sens de l'article II.25.4 de la convention de subvention, dont la « gravité » pourrait être appréciée par l'agence. En définitive, le non-respect des conditions d'éligibilité des coûts n'entraîne comme conséquence que leur inéligibilité.
104 En tout état de cause, même s'il fallait déduire de l'article II.25.4 de la convention de subvention que la réduction du montant d'une subvention en raison du non-respect des conditions d'éligibilité des coûts doit être « proportionnelle » à ce non-respect, c'est à juste titre que la Commission fait valoir qu'il n'est pas possible, en l'espèce, de déterminer l'existence d'un certain degré de conformité de la passation des marchés en cause avec le principe de bonne gestion financière. En effet, le fait, non remis en cause par la requérante, que les marchés en cause n'ont pas été organisés en garantissant la transparence, la concurrence et l'égalité de traitement des soumissionnaires et, partant, le respect du principe de bonne gestion financière affecte nécessairement l'entièreté des coûts afférents et entraîne donc leur inéligibilité. Par suite, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la réduction du montant de la subvention en cause à hauteur de l'intégralité des coûts exposés par cette dernière dans le cadre des marchés n'ayant pas respecté le principe de bonne gestion financière est, en tout état de cause, proportionnelle au non-respect des conditions d'éligibilité tirées de ce principe.
105 En cinquième lieu, la requérante insiste sur le fait que le projet aurait été mis en œuvre et achevé avant la date limite fixée dans la convention de subvention.
106 À cet égard, il y a lieu de rappeler que la subvention ne représente pas la contrepartie de la réalisation du projet visé par la convention de subvention. Les sommes versées par la Commission au titre de celle-ci le sont uniquement en vue de permettre au bénéficiaire de faire face aux coûts engendrés par cette réalisation. Dès lors qu'une partie de ces coûts a été jugée inéligible, la subvention doit faire l'objet d'un recouvrement à due concurrence desdits coûts par la Commission, le fait que le bénéficiaire ait entre-temps mené à bien le projet visé par la convention de subvention n'étant pas de nature à influer sur leurs conditions d'éligibilité (voir, en ce sens, arrêts du 28 février 2019, Alfamicro/Commission, C‑14/18 P, EU:C:2019:159, point 68, et du 16 juillet 2020, ADR Center/Commission, C‑584/17 P, EU:C:2020:576, point 107).
107 Le fait que le projet a été mis en œuvre n'exempte donc pas la requérante du respect des conditions d'éligibilité fixées par la convention de subvention pour pouvoir demander le remboursement des coûts qu'elle a exposés dans ce cadre.
108 En sixième lieu, dans la mesure où la requérante fait valoir que le projet ne la concerne pas directement, mais sert l'intérêt public de l'Union, il suffit de constater que, aux termes de l'article II.8.1 de la convention de subvention, les droits de propriété des résultats du projet, notamment des aires de stationnement sécurisées, appartiennent à la requérante. Ainsi, la réalisation du projet concerne bien directement la requérante et ce projet ne peut donc pas être considéré comme servant avant tout les intérêts de l'Union.
109 En septième lieu, dans ce même contexte, la requérante fait référence à un prétendu principe d'équité. Toutefois, les références à ce prétendu principe sont invariablement mentionnées conjointement avec le principe de proportionnalité, ainsi qu'il résulte des points 39 et 40 de la requête et du point 18 de la réplique.
110 Ainsi, la requérante ne distingue pas clairement le principe de proportionnalité du principe d'équité et omet d'expliciter les contours juridiques de ce dernier concept ainsi que les raisons spécifiques pour lesquelles elle considère que celui-ci a été violé en l'espèce. Étant donné, en outre, qu'il ressort de la jurisprudence que l'équité ne permet pas de déroger à l'application des dispositions de droit de l'Union hors les cas prévus par la réglementation (voir arrêt du 6 novembre 2014, Grèce/Commission, T‑632/11, non publié, EU:T:2014:934, point 33 et jurisprudence citée), les arguments de la requérante tirés d'un prétendu principe d'équité doivent être écartés pour les mêmes raisons que ceux qu'elle a avancés, dans le même contexte, sur la base du principe de proportionnalité (voir point 108 ci-dessus).
111 En huitième lieu, la requérante aborde la possibilité que le recouvrement de l'intégralité du financement puisse conduire à sa faillite et donc à la perte d'emplois ainsi qu'à la fermeture des aires de stationnement sécurisées. Comme le fait valoir à juste titre la Commission, la requérante n'a pas mis en avant d'éléments de preuve susceptibles de démontrer que sa faillite serait le résultat inévitable et direct du recouvrement forcé et que, le cas échéant, elle découlerait de la décision attaquée. En tout état de cause, le règlement 2018/1046 ne soumet pas le recouvrement forcé à la condition que celui-ci n'entraîne pas la faillite du débiteur (voir, en ce sens, arrêt du 29 mars 2023, CIMV/Commission, T‑26/22, non publié, EU:T:2023:172, point 126). Cet argument doit donc également être rejeté.
112 Il s'ensuit que, tout comme les premier et troisième moyens, le deuxième moyen doit être rejeté, de sorte qu'il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.
Sur les dépens
113 Aux termes de l'article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens.
114 En l'espèce, la requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (sixième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Ausnit, Olariu și Asociații SRL est condamnée aux dépens.
Costeira | Kancheva | Tichy-Fisslberger |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 avril 2025.
Signatures
* Langue de procédure : le roumain.
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